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Les toilettes pour femmes : au coeur des revendications féministes 

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Img: symboles de toilettes femme et homme
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Par les membres du comité de genre de PDF Québec, 28 septembre 2023

Depuis le 19e siècle, les femmes ont fait avancer leurs droits et leurs conditions de vie, que ce soit pour obtenir des toilettes publiques, comme l’a fait l’Association sanitaire des dames1 au milieu du 19e siècle en Grande-Bretagne, ou pour permettre aux travailleuses d’avoir accès à des toilettes séparées, avec la loi de 1887 au Massachusetts. Récemment, à Mumbai en 2012, des féministes lançaient la campagne Right to Pee, car les toilettes pour femmes y étaient moins nombreuses et payantes, contrairement à celles des hommes qui étaient accessibles gratuitement2. C’est pourquoi la tendance actuelle à vouloir créer des toilettes mixtes pour tous est critiquable.

Nous comprenons que les personnes s’identifiant comme trans et non binaires souhaitent disposer de leurs espaces à elles, ou encore que les hommes puissent se sentir plus à l’aise avec des cloisons, et nous n’aurions aucune raison de nous opposer à de telles revendications. En revanche, cela ne doit pas se faire au détriment de la sécurité et de l’intimité des femmes. Dans le rapport de la Sécurité publique sur les infractions sexuelles en 2021, on note que ces infractions ont augmenté de 109,9 % entre 2012 et 2021 et que 95, 4% des auteurs présumés sont des hommes, preuve que la notion de sexe est pertinente. Si « on exclut les résidences d’habitation, les autres infractions d’ordre sexuel sont le plus souvent commises dans un établissement d’enseignement (8,6 %), alors que les agressions sexuelles le sont plus souvent dans un établissement commercial (5,6 %)3 ». Au Canada, les chiffres démontrent que 4,5 femmes sur 100 000 habitants commettent des infractions sexuelles par rapport à 105 hommes sur 100 000 habitants. Pour les personnes de sexe masculin s’identifiant comme femmes, le ratio est de 85 sur 100 000 habitants. Les deux infractions sexuelles les plus répandues dans les toilettes publiques sont l’exhibitionnisme et le voyeurisme. Nous n’accepterons en aucun cas que soit affaiblie la sécurité de nos espaces pour quelque raison que ce soit.

Les toilettes mixtes pour tous comportent d’autres inconvénients au-delà de ces risques. À l’école publique Jean Lumb de Toronto, les garçons faisaient pipi sur les sièges des toilettes, si bien que certains parents devaient envoyer leurs filles à l’école avec des lingettes pour nettoyer les sièges avant utilisation. Des garçons s’encourageaient entre eux à espionner les filles en passant la tête sous les cloisons. De plus, une jeune fille de 5e année qui a eu ses premières règles a dû vivre cette première expérience dans une salle de toilette remplie de garçons4. En Grande-Bretagne, des adolescentes se sentaient anxieuses ou avaient honte d’aller dans ces toilettes pendant leurs menstruations, au point où certaines arrêtaient de s’hydrater dans la journée pour ne pas les fréquenter5.

La psychiatre progressiste Marie-Ève Cotton commentait dernièrement dans La Presse6 qu’une telle situation était « purement hypothétique » et affirmait que de baisser les bras devant les comportements déplorables de certains garçons revenait à accepter qu’ils ne changeraient jamais . Or, ce que Dre Cotton oublie, c’est que ces comportements ne changeront pas du jour au lendemain et que le fait de rendre les toilettes unisexes avant même la tenue d’une commission parlementaire telle qu’elle le propose équivaudrait, en bon français, à mettre la charrue devant les bœufs.

La Dre Cotton mentionne également que, non seulement les agressions sexuelles [rapportées] n’augmentent pas lorsque des toilettes mixtes sont mises en place, mais que les jeunes de sexe masculin s’identifiant comme filles seraient beaucoup plus victimisés dans les espaces pour hommes qu’ils ne victimisent les filles.

Cela demeure à prouver, mais une telle affirmation fait fi de deux observations fondamentales du féminisme : d’abord, le fait que des personnes de sexe masculin se fassent harceler, voire agresser, dans des espaces réservés aux hommes, ne devrait pas faire en sorte que les femmes doivent faire des compromis sur leur intimité. Exiger que les femmes fassent des compromis pour assurer le confort des hommes, c’est l’une des bases de ce que l’on appelle le patriarcat; l’idée selon laquelle le confort ou la sécurité des hommes passe avant ceux des femmes.

Ensuite, il est capital de se rappeler que, pour bon nombre de femmes, le fait de permettre à des personnes de sexe masculin d’entrer dans des espaces censés être réservés aux femmes constitue une forme d’agression.

Lorsque nous utilisons des espaces réservés aux personnes de même sexe, nous consentons à voir et à être vus par des personnes de même sexe. Si des personnes de sexe opposé sont autorisées à y pénétrer sur la base d’un ressenti auto-proclamé, ce consentement est nié, et la présence d’individus de sexe opposé sera vécue comme une agression.

Nous savons déjà que l’absence d’endroits permettant aux femmes de se soulager restreint la mobilité des femmes dans la société, puisqu’elles doivent alors calculer leurs déplacements en fonction de leur possibilité d’utiliser les toilettes. Celles qui sont incapables d’utiliser des infrastructures mixtes risquent donc de tout simplement limiter leurs déplacements. Ceci inclut évidemment les survivantes d’agressions sexuelles ou de violence conjugale, mais également les femmes les plus vulnérables de notre société : celles qui n’ont tout simplement pas le droit, souvent par pression communautaire, de se trouver en état de nudité même partielle en présence d’hommes inconnus. Quel message ces chevaliers blancs de l’inclusion envoient-ils aux femmes juives orthodoxes, aux femmes musulmanes strictes lorsqu’ils leur disent que, pour le bénéfice d’un minuscule pourcentage de la population, elles devront renoncer aux espaces dont elles dépendent pour pouvoir circuler dans l’espace public?

Avec les toilettes mixtes pour tous, les droits des femmes reculent. Certains ministres en Grande-Bretagne sont en train de faire marche arrière sur ce sujet6, et le groupe Sex Matters est prêt à intenter des recours juridiques pour protéger les droits des filles dans les écoles8. Ajouter quelques toilettes universelles est possible sans imposer aux femmes et aux filles un traitement injuste.

 

Sources:

En français:
3 INFRACTIONS SEXUELLES EN 2021 MINISTÈRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE - Rapport
6 La Presse - Boss des bécosses

En anglais:
1 History of women's public toilets in Britain
2 BBC - Indian campaign demands 'Right to Pee' for women
4 The Star - Gender neutral school washrooms only serve to humiliate students
5 DailyMail - Girls skipping school to avoid gender neutral toilets
7 DailyMail - Ministers push plan to reverse gender neutral toilets
8 Thousands of schools could be at risk of breaking the law by allowing children to use toilets and changing rooms according to their chosen 'gender identity' rather than biological sex, report warns

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